Jean-Jacques Goldman, 30 ans et Démodé

« Nom, prénom, numéro, photo, signe particulier, t’es géant, t’es zéro, mais décline une identité » : Jean-Jacques Goldman. 2011 marque le 60ème anniversaire du chanteur, mais aussi les 30 ans de la sortie de son premier album solo éponyme, qui aurait dû s’appeler Démodé. Coup d’œil dans le rétro.

C’est donc en septembre 1981, peu avant les 30 ans du chanteur, que sort dans les bacs le tout premier album de Jean-Jacques Goldman chez Epic. Il fait notamment suite à trois disques avec le groupe de rock Taï Phong et trois 45 tours en solo parus chez WEA. Album éponyme, il aurait pourtant dû s’appeler Démodé, mais cette idée a jeté un froid chez la maison de disque. Avec le succès il réussira par la suite à imposer ses choix comme par exemple mettre des chaises en couvertures de son double Entre gris clair et gris foncé. Mais ça c’est une Autre histoire.

Démodé donc, parce qu’encore bien ancré dans le son des années 70. S’il chante bien en français, JJG a composé des titres aux sonorités très rock forts de riffs efficaces et de mélodies (déjà) imparables. Au milieu de tout ça, un hit, Il suffira (d’un signe), qui n’a pas pris une ride. Au final, 11 titres composent ce premier opus de celui qui deviendra le plus gros vendeur du pays et l’artiste français le plus populaire des années 80 et 90.

L’album s’ouvre sur A l’envers, une chanson terriblement négative (« J’suis pas doué, j’sais pas y faire, le cœur à l’envers, j’fais jamais l’affaire ») et une manière singulière d’ouvrir un premier album. Mais la musique est bonne et la rythmique donne le ton du disque, résolument rock. Suit Sans un mot, sur un rythme speedé, titre phare et universel sur la révolte de la jeunesse et les idéaux déchus. Ce titre, assurément l’un des titres les plus rock de sa discographie, a d’ailleurs été maintes fois joué en concert.

Place ensuite à Brouillard, l’une de mes chansons préférées dans tout le répertoire de Jean-Jacques Goldman. Première d’une longue série sur le thème de l’exil comme seul échappatoire pour trouver un sens à sa vie (suivront Américain, Là-bas ou On ira), Brouillard est une véritable inspiration. Il y en aura d’autres ! De son côté, Pas l’indifférence place sur une mélodie toute en douceur un texte fort sur la perte des valeurs et la négation de soi. Une chanson là encore emblématique de son répertoire.

Le premier single extrait de l’album, Il suffira (d’un signe) est un vrai carton. Détail amusant : la chanson a longtemps été associée à l’arrivée au pouvoir de François Mitterrand quelques mois avant sa sortie, alors qu’en fait elle a été écrite deux ans plus tôt à propos de ce qui se passait en Iran !

J’t’aimerai quand même est un autre gros coup de cœur, l’une de mes préférées de l’album avec Brouillard et Il suffira. On y trouve des mots qui claquent sous les coups d’un riff lourd et entêtant. C’est aussi le titre où JJG pousse sa voix le plus dans les aigus, sa marque de fabrique à l’époque.

Arrive alors Autre histoire, une mélodie passe-partout sur le thème de la destiné. Il sera, avec celui de la route et de l’exil, l’un des plus développé par Jean-Jacques Goldman tout au long de sa carrière, même si ce titre n’est franchement pas transcendant. Quant à Quelque chose de bizarre, deuxième 45 tours extrait de l’album (un bide, le dernier), s’il a fait l’objet de tout un tas d’interprétations il me laisse personnellement froid. C’est l’une des (très) rares chansons de son répertoire qui ne me parle pas, incontestablement la fausse note de cette album.

Quel exil reprend une fois de plus le thème de la naissance et de la destiné dans un style plus rock qu’une Autre histoire. Le dixième titre, c’est Le rapt, qui a longtemps été ma chanson préférée de cet album. Elle dénonce une certaine lutte des classes dans les relations humaines et pointe encore une fois les injustices liées à la naissance. Signalons qu’il a rejoué ce titre beaucoup plus tard sur scène lors de la tournée En passant !

L’album se termine avec Juste un petit moment encore, une formidable chansonnette toute simple (qui n’est pas rappeler « la vie c’est mieux quant on est amoureux » qui termine Chansons pour les pieds). C’est vraisemblablement un clin d’œil aux chanteurs de bal qu’il respecte tant et qui clôt parfaitement ces 45 minutes de bonheur.

Au final, Démodé est un formidable album pop rock, superbement produit, à la croisée des chemins entre le son alternatif des années 70 et les années 80, un disque entre deux modes sans être précisément « démodé ». Il impose surtout un style d’écriture et des thématiques qui seront le ciment de sa discographie. Si le son est un peu daté aujourd’hui, le plaisir reste intact. Ce disque demeure encore aujourd’hui l’un de mes préférés de Jean-Jacques Goldman. Mieux, c’est sûrement celui que j’écoute le plus fréquemment, sans jamais m’en lasser ! Et vous ?

Playlist : A l’envers | Sans un mot | Brouillard | Pas l’indifférence | Il suffira | J’t’aimerai quand même | Autre histoire | Quelque chose de bizarre | Quel exil | Le rapt | Juste un petit moment

David Bénard

Journaliste vie numérique et mobilité, j'ai la tête à Indianapolis, le coeur à Nantes et le reste en Île-de-France...